S'il y a un film qui défraie la chronique à l'heure actuelle c'est bien celui de Zac Snyder. Si Batman v Superman était très attendu par les fans et le public en général, l'accueil fut violent à tel point que critiques professionnels et fans vomissent encore leur haine sur les réseaux sociaux. D'ailleurs, je me demande souvent si nous avons vu le même film, car s'il n'est pas exempt de défauts, Batman v Superman est très loin de mériter un tel acharnement.
Tout d'abord, Batman v Superman se veut l'adaptation du très célèbre comics de Franck Miller Batman : The Dark Knight Returns , du moins, Snyder ne se cache pas de s’en être inspiré fortement. Mais comme toutes adaptations de comics, de livres, ou de ce que vous voulez, le résultat est avant tout la vision toute personnelle d'un réalisateur. On adhère ou pas à cette vision, mais en aucun cas il n’est pertinent de parler de fidélité totale ou non à l’œuvre originale, c'est un non-sens, car ce que l'on attend d'un réalisateur, c'est une certaine singularité qui, par définition, diffère du support d'origine. Cela me paraît tout de même assez logique, hein, mais apparemment ça ne l’est pas pour tout le monde. Je le répète pourtant souvent, je vais finir par me fatiguer.
Batman : The Dark Knight Returns donc, et en effet, nous retrouvons pas mal d'éléments de l'histoire de Miller dans le film : un Batman vieillissant, très sombre, qui a déjà combattu le crime depuis plus de 20 ans, a vécu la perte d'un Robin et n'a jamais été aussi hanté par le meurtre de ses parents.
Ces éléments font de notre Bruce Wayne certainement l'un des plus sombres et tourmentés vus à l'écran à ce jour. Ben Affleck le campe merveilleusement, sans surenchère et avec beaucoup de puissance. S'il y a une chose sur laquelle les haters sont d'accord, c'est que malgré toutes leurs réticences, Ben Affleck est un excellent Batman (c'est déjà ça !). Autre élément du comics présent dans le film, le costume du Bat, parfait à tout point de vue.
Nous voilà dans un background connu des lecteurs de comics, moins de ceux qui n'en lisent pas à qui certaines références ou clins d’œil peuvent échapper, mais en aucun cas interférer dans la compréhension de l'histoire. Et c'est là que la vision de Snyder se met en place, l'intrigue, la chronologie, la mise en scène toute en virtuosité.
L'histoire prend place juste après les événements de Man of Steel, on connaît donc Superman, presque intimement et, pendant son combat final avec le Général Zod, Bruce Wayne assiste impuissant à la destruction massive de Metropolis (après celle de Smallville). Dès lors, Superman est vu par Bruce comme une menace que personne ne pourra contrôler. Agacé par l'aura quasi christique de l'Homme de fer, Bruce ne voit en lui que le Kryptonien, l'extra-terrestre qu'il doit éliminer pour sauver sa planète.
Voici le premier tour de force du réalisateur, la logique de l'histoire, la continuité avec Man of Steel, et cette grande et énorme scène qui ouvre le bal, parfaitement maîtrisée et qui donne le ton du film ; on sent très bien le « ça va chier !!!! ».
Dès lors, BvS alterne entre scènes de combats (celles avec le Batman sont stupéfiantes, puissantes, violentes, et j'ai envie de dire : ENFIN !!!) et questionnements sur les conséquences des actes des super-héros. C'est intelligent, plutôt bien amené et donne lieu à de très jolies scènes presque contemplatives. Mais là où le public s'est perdu, c'est au niveau de la continuité narrative. Le film contient pas mal de scènes de rêve qui coupent le rythme et qui peuvent donner l'impression d'un montage chaotique. Personnellement, cela ne m'a pas gênée du tout et certaines scènes de rêve servent même parfaitement l'intrigue, mais je peux comprendre que cela déstabilise un peu. Cependant, de là à crier au scandale et au montage, je cite, « merdique », faut pas non plus pousser mémé. Ceux qui se plaignent de n'avoir « rien compris » exagèrent un brin, ma fille de 9 ans a tout pigé des 2h40 du film, et elle n'a que... 9 ans, hein ! Elle est en CE2... enfin je dis ça, je dis rien.
Autre point du film sujet à controverse, la manière dont Batman et Superman redeviennent potes, ou du moins arrivent finalement à une entente. Je ne vais pas spoiler le film, mais ce moment-là, qui se doit d'être fort et plein d'émotions est tourné en ridicule par des gens qui n'y ont rien compris. C'est fort dommage, car même s’il ne dure pas très longtemps, il est pourtant plein de sens et je dirais même fortement bien trouvé. À ce moment précis de l'histoire, Batman voit enfin en Superman l'humanité qui lui manquait et ce parallèle basé sur un prénom est totalement novateur et n'a même jamais été fait par un auteur de comics. J'ai trouvé cela beau, gonflé certes, mais beau, cohérent avec l'ensemble et surtout le caractère fort torturé de notre Bruce, dont l'obsession malsaine pour la mort le menait droit à sa perte.
Alors oui, il y a des choses qui m'ont agacée comme un Lex Luthor qui passe plus pour un bouffon que pour le véritable psychopathe qu'il est vraiment. Il ne fait donc pas assez peur à mon goût, malgré tout le respect que j'ai pour l'acteur. La présentation bien trop rapide des membres de la Justice League m’a aussi déçue, mais bon, ça se comprend, le film ne pouvait pas faire 4 heures non plus.
Batman v Superman a des imperfections, mais il reste tout de même un très bon film de super-héros, intelligent, bien interprété, dont les scènes de combats sont le point fort (Snyder est vraiment doué pour ça et nous offre ce que Christopher Nolan n'a pas su faire), sans parler de l'arrivée badass de Wonder Woman qui a une putain de classe.
On a le droit de ne pas adhérer, aimer, le travail du réalisateur sur ce projet et certaines critiques sont légitimes, mais ce qui me gêne le plus, c'est le déferlement de haine extrêmement malsain que j'ai pu lire. Ce bashing violent avait déjà fait son apparition lors de la sortie du dernier Star Wars, mais là je crois qu'on atteint le summum de la connerie. Les gens se comportent comme si ces personnages et ces univers fictifs leur appartenaient, j'ai l'impression d'entendre parler de religion...
Oh, les gars, Batman et Superman, ils n'existent pas en vrai, hein ! Leurs histoires, publiées depuis plus de 75 ans, ne sont pas des Évangiles, elles ne dictent aucune ligne de conduite et si les comics peuvent parfois faire passer des messages forts (et il me semble que c'est le cas de beaucoup d’œuvres artistiques) ils n'ont pas vocation à montrer la voie ou apporter « La bonne nouvelle ». Vous allez faire quoi la prochaine fois ? Poser des bombes ? L'ennemi à abattre sera celui qui a aimé le film (ou pas) ou qui se balade avec un tee-shirt Batman sans avoir lu un comics ? Vous vous prenez pour qui ? Les détenteurs de la sacro-sainte culture comics ? Et faut-il que nous soyons absolument d'accord avec vous ? Sous peine de se faire flageller la gueule... ou se faire démonter sur les réseaux sociaux comme si on était des merdes sans cervelle ?
La pop culture, mes amis, n'appartient à personne en particulier, elle appartient à tout le monde, dans sa grande diversité. Que l'on soit lecteur de comics ou simplement fan d'adaptations, que l'on aime Marvel et/ou DC, Disney, Star Wars ou que l'on rêve en secret d'une sex tape avec Poe Dameron (comment ça je suis démasquée ?????)
cette culture-là se doit de rassembler et non de diviser. Ces dérives m'inquiètent beaucoup, m'attristent et me poussent à fuir les réseaux sociaux, quand l’événement réjouissant qu'est la sortie d'un film tourne au ridicule et au tragi-comique. Ce qui fut un temps un véritable plaisir, partager son enthousiasme et son avis avec d'autres personnes susceptibles de vous comprendre, est devenu impossible et nous oblige finalement à faire comme avant, garder pour soi son avis, son bonheur ou son mécontentement.
Un comble, à l'heure où l'on peut enfin parler de super-héros, sans passer pour un satellite en orbite. Dommage.
Tout cela attriste beaucoup Loki également... (bon oki c'est juste une excuse pour poster son gif...) |